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Visite de l’observatoire solaire Thémis , à Tenerife

 

Un téléscope héliographique pour l’étude  du magnétisme et des instabilités solaires

 Article de Pierre Gibaud

Au volcan du Teide à Tenerife, sur le bord Est de la Caldera à 2400 m d’altitude, on a installé 8 coupoles et 4 tours solaires gérées par différents pays.  

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THEMIS = Télescope Héliographique pour l’Etude du Magnétisme et des Instabilités Solaires. Cet observatoire a été construit par la France et l’Italie et il est géré avec l’Espagne.  

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 Dans le hall, des illustrations pour les touristes, non visiteurs de la partie scientifique.

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En 2008, sur rendez-vous, le directeur français va nous piloter dans toutes les installations. D’abord quelques explications sur le soleil, ses taches, son activité variable…

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Par l’escalier, nous montons vers la coupole. Par une fenêtre, on voit le pic du Teide. 

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Dans la coupole, il fait presque noir. Seulement un fin croissant de lumière aveuglante passe entre la coupole et l’extrémité du télescope.Le mouvement du télescope étant ultra précis, tandis que celui de la coupole est moins rigoureux en raison du vent, un petit espace est donc nécessaire entre les deux.

Une photo au flash montre le tube bleu du télescope : diamètre 90 cm longueur 8 m.  

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On s’habitue à l’obscurité et on observe la plate-forme fixe bien distincte de la partie centrale circulaire et mobile sur laquelle il est interdit de marcher pour éviter les vibrations. 

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Pour étudier chaque longueur d’onde spécifique, un « monochromateur » partage la lumière de façon convenable en « repliant » les rayons dans le tube du télescope.Un miroir orienté par un dispositif micrométrique, sélectionne ensuite la bonne couleur. 

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A la base du télescope, les capteurs couplés à l’électronique de mesure sont montés sur des tables 2D à mouvements micrométriques. 

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Nous redescendons dans les bureaux d’analyse et d’enregistrement des mesures. 

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Sur l’un des écrans on peut lire la date et l’heure du cliché  23-07-2008 et 12 h 11 mn 35 s. Mais on voit surtout les coordonnées du point de mesure et divers paramètres.  

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Sur la droite de l’écran suivant on voit des courbes symétriques. C’est l’action du magnétisme solaire sur les raies spectrales de sa lumière : elles sont dédoublées. 

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Explication : Contrairement à la lumière émise par incandescence qui a un spectre continu, la lumière émise par les atomes ne concerne pas toutes les fréquences mais seulement quelques unes. Le spectre comporte des raies colorées propres à chaque type d’atome.

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Mesure du magnétisme solaire. En 1896, le hollandais Zeeman a découvert qu’un champ magnétique intense dédouble les raies spectrales et l’écart est proportionnel à son intensité. Il suffit donc de mesurer l’écartement des raies dédoublées pour connaître la valeur du magnétisme du soleil (ou d’une étoile). Dans une tache solaire, le champ magnétique est 600 fois plus intense que le champ magnétique terrestre moyen. 

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Au centre du soleil, la fusion thermonucléaire de l’hydrogène produit de l’hélium et beaucoup d’énergie. La chaleur est finalement transmise par convection dans le « manteau » solaire.Mais à des milliers de degrés, la matière est ionisée. Cette matière électrisée en mouvement crée un champ magnétique selon les lois de la magnétohydrodynamique. La mesure du magnétisme renseigne donc sur l’activité du soleil aux multiples conséquences sur la Terre. 

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La variabilité de l’activité solaire contribue à la variabilité du climat terrestre. Déjà, en 1801, Herschel, l’astronome anglais découvreur d’Uranus, avait observé que lorsque les taches solaires étaient rares, la récolte de blé était insuffisante et le cours montait à la bourse aux grains de Londres !

Voici deux courbes montrant le parallélisme évident entre le nombre annuel moyen de taches solaires et l’évolution de la température moyenne terrestre.   

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Les rayons cosmiques découverts par Pierre Auger en 1932 sont mesurés continuellement depuis. La courbe suivante montre que lorsque le nombre de taches solaires augmente (magnétisme solaire plus intense), le flot des rayons cosmiques qui arrivent sur Terre est fortement diminué : le magnétisme solaire est un bouclier anti- rayons cosmiques.  

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Actuellement le magnétisme solaire est faible malgré quelques éruptions solaires (elles sont spectaculaires pour le journaliste mais banales pour l’astronome !). Le cycle n° 24 en cours, est arrivé tardivement en 2010  au lieu de 2008 et n’est pas très actif comme ce fut le cas lors des précédents épisodes de refroidissement terrestre. 

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Avant de nous quitter, le directeur nous a  dit : « le soleil est faiblard et je pense fortement qu’il va faire mentir le catastrophisme de Nicolas Hulot et ses amis ! »

Pour nous géologues, nous savons bien que les variations du climat terrestre ont plusieurs causes principales :les variations des paramètres astronomiques  et les aléas solaires,la variation de la concentration des gaz à effet de serre, l’effet albédo, le volcanisme. Le CO2 dégagé par l’homme est un facteur aggravant mais récent comparé à la variabilité des paléoclimats depuis des centaines de millions d’années.

Nous sortons sur la terrasse pour déambuler parmi d’autres installations.

Placé sur un local technique, voici un cadran solaire complexe qui illustre les compétences mathématiques des astronomes du site !   

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Nous redescendons vers la vallée par la route taillée dans les paysages volcaniques. 

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Pierre GIBAUD

Pour en savoir plus sur Themis :  http://www.canal-.tv/video/science_en_cours/le_telescope_solaire_themis.161

 

                                                                                           

 

Reportage photographique à Tenerife

 

Couleurs du Teide, le volcan de Tenerife        

 Pierre Gibaud

L’archipel des Canaries, province espagnole au large du Maroc est formé de 7 îles principales. Chacune est un volcan de point chaud dont l’activité s’étale de 10 Ma à nos jours.

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 Le Teide est le pic principal du massif volcanique de Tenerife, la plus grande île.

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C’est le troisième volcan du monde après ceux de Hawaï,si on décompte leur hauteur à partir du plancher océanique. Il culmine à 3718 m au-dessus de la mer.

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Tenerife est agé de 3,5 Ma, tandis que le pic central n’a que 0,2 Ma et les dernières coulées datent de 1909. Christophe Colomb l’a vu en activité et a préféré faire escale à l’île de La Gomera.

                              Voici une excursion illustrée par mes photos                      prises au cours de plusieurs voyages.

En montant par la route nord, en zone forestière, voici une « rose de basalte » (4 m x 5m) à l’extrémité d’une de coulée. Cette solidification en orgues radiales est assez rare. 

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 Parmi les pins canariens (à 3 aiguilles), voici la silhouette du Teide.

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La route creusée dans les couches de cendres (gravillons agglomérés) permet de voir les empilements diversement colorés selon la composition de la lave à diverses époques ! 

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Un panneau  explique l’origine des différentes couches : claires ou sombres. 

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L’analyse des isotopes du soufre permet de savoir à quelle altitude les cendres ont été éjectées.Plus elles montent haut et plus le bombardement par les neutrons solaires fabrique de l’isotope 33S. La mesure du rapport 33S / 32S permet de connaître la violence de l’explosion.

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Une plate-forme naturelle porte des antennes et plusieurs observatoires internationaux.   

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Nous voici arrivés dans la caldeira dont l’altitude varie de 2000 à 2200 m.Sa largeur d’Est en Ouest est de 15 km et par endroits la paroi atteint 500 m de hauteur !Dans ce vaste espace, on trouve des coulées de tous âges.

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Quelques roches colorées.

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Vue du Teide face Est. 

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Les coulées récentes sont noires et souvent riches en obsidienne.

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L’obsidienne est un verre naturel sombre aussi brillant et coupant que le verre des hommes.

Avec le temps, au bout de plusieurs siècles ou millénaires,les composés ferreux s’oxydent et les coulées prennent alors une couleur rouille. 

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Sur les flancs du pic on observe des coulées très visqueuses pleines de rides. 

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Dans ce mode minéral, la vie est bien présente et le parc national du Teide est une réserve naturelle très protégée : « El Parque Nacional de las Cañadas ».

Après les lichens, et quelques plantes naines, les premiers végétaux de grande taille à coloniser les coulées, sont une variété de « genêts » dont les racines fracturent les blocs.

Le tajinaste ou vipérine rouge est propre à Tenerife. Bisannuelle, ses fleurs sont roses et donnent de petites graines ressemblant aux graviers volcaniques appelés « picón ». 

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Les fleurs attirent les insectes dont se régale le lézard « Gallotia ». 

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          Dans la caldeira, des volcans annexes ont été détruits par l’érosion. Il ne reste que le bouchon solidifié dans la cheminée. 

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En 1995, le téléphérique fonctionnait encore et nous a permis de monter sur le pic du Teide. La tache blanche vue d’en bas est une coulée de lave carbonatitique.

Les laves carbonatitiques dérivent d’un magma exceptionnellement enrichi en CO2 et Ca selon des modalités encore mal connues. Elles jaillissent noires, plus ou moins rougeoyantes et blanchissent très vite une fois refroidies, les minéraux s’altérant avec l’humidité. 

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Au sommet, nous sommes à côté de cette même tache blanche. 

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Vue d’en haut à 3600 m, on domine la  caldeira qui fut remplie par de la lave.Nous sommes à 80 m sous le sommet dont on voit le sentier d’accès au premier plan. Il n’est autorisé qu’à un petit nombre de scientifiques afin de protéger le site des hordes de touristes.

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Au pied du téléphérique, un muret montre la diversité des roches colorées. 

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 Au soleil couchant, les couleurs sont particulièrement agréables. 

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Nous sortons de la caldeira.

Voici le télescope solaire Thémis que je vous ferai visiter en détail dans un prochain article. 

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      Vue sur la plaine côtière de Candelaria sur la côte Est.

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      Et un dernier regard sur le pic. 

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Si vous allez  en vacances à Tenerife, il faut monter au Teide rien que pour le plaisir des yeux. Evitez les minibus pleins de touristes car vous aurez tous les mêmes photos faites aux « arrêts japonais » ! Louez une voiture pour la journée. Les routes sont assez larges et sans danger particulier. On peut accéder à la caldeira par au moins 5 routes différentes.

Enfin une information climatique importante. Le Teide et la ligne des crêtes SO / NE sépare Tenerife en deux zones climatiques :

– Le Sud-Est est semi désertique type Marakech et regroupe l’essentiel des touristes.

– Le Nord-Ouest est océanique doux type Biarritz l’été : vigne, bananiers, nuages l’après midi !

Bon voyage !

Pierre GIBAUD