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Super-volcanisme et crise biologique fini-permienne

 

« Pour la Science » – 27.01.2012 

 

Il y a 251 millions d’années, 70 % des espèces terrestres et 95 % des espèces marines ont brusquement disparu. Cette extinction de masse, dite crise Permien-Trias ou encore crise fini-permienne, est la plus grande connue. Quelles sont ses causes ?

 

Les hypothèses vont de la formation du supercontinent géant de la Pangée aux impacts météoritiques en passant par le supervolcanisme. Or à la fin du Permien (il y a 299 à 251 millions d’années), un volcan géant a déposé quelque sept millions de kilomètres cubes de basaltes en Sibérie. Selon les conclusions complémentaires de plusieurs équipes, la pollution atmosphérique qui en a résulté serait le facteur clef de l’extinction de masse.

Nommés « traps de Sibérie », les épais épanchements basaltiques sibériens commencent juste derrière l’Oural et couvrent environ deux millions de kilomètres carrés, soit plus de trois fois la superficie de la France. Actif pendant plus d’un million d’années, ce volcanisme massif a déposé des couches de basaltes sur plusieurs kilomètres d’épaisseur et a pollué l’atmosphère. Pour préciser comment, Benjamin Black, du MIT, a étudié la composition chimique des inclusions vitreuses que l’on retrouve dans les falaises de laves sibériennes. Anciennes gouttelettes de magma liquide, ces inclusions renferment du gaz figé au sein de cristaux. Leur analyse chimique révèle notamment leurs teneurs en chlore, en soufre et en fluor. Rapportées à la masse des traps, ces teneurs suggèrent que 8 700 gigatonnes (milliards de tonnes) de chlore, 7 800 gigatonnes de soufre et entre 7 100 et 13 800 gigatonnes de fluor ont été larguées dans l’atmosphère. Pareilles émissions ont entraîné des pluies très acides et ont contribué à un changement climatique.

trapps sibérie

 

Or un réchauffement brutal était déjà enclenché par la libération d’énormes quantités de dioxyde de carbone, accompagnée d’émissions massives d’hydrocarbures halogénés, destructeurs de la couche d’ozone. C’est ce qu’ont établi en 2009 Henrik Svensen, de l’Université d’Oslo, et ses collègues, en montrant que l’arrivée du magma a provoqué un craquage massif de la matière organique contenue dans les sédiments de l’immense bassin sédimentaire de la Toungouska. Un dégazage intense s’en est suivi, qui s’est traduit par la formation de quelque 6 400 cratères de plusieurs kilomètres de diamètre?

Impressionnant ? La situation fut pire encore ! Hamed Semei et ses collègues de l’Université de Calgary, au Canada, ont examiné le rôle du mercure relâché durant l’éruption. Grâce à des échantillons provenant d’une coupe sédimentaire profonde du haut arctique canadien, ils ont retracé les variations à travers les temps géologiques du mercure atmosphérique. La concentration du mercure, issu notamment de la combustion des charbons et des pétroles à la faveur de l’éruption, a explosé à la fin du Permien pour atteindre environ 30 fois la concentration actuelle. Or il est bien connu aujourd’hui que le mercure atmosphérique s’accumule dans les algues et les autres organismes marins à la base de la chaîne alimentaire océanique.

Résumons : le supervolcanisme sibérien de la fin du Permien a déclenché un réchauffement climatique brutal, s’est accompagné de pluies fortement acides et a fait disparaître la couche d’ozone. Tout cela peut expliquer la disparition de 70 pour cent des formes de vie terrestres… mais pas celle de 95 pour cent des formes de vie marines. Certes, en mer, l’acidification des eaux due aux pluies acides et à la dissolution des gaz atmosphériques a pu jouer un rôle important, mais elle ne semble pas pouvoir expliquer à elle seule une extinction quasi totale. Un facteur supplémentaire a été nécessaire : l’empoisonnement massif des océans par le mercure ?

François Savatier, journaliste à « Pour la Science ».

Lancement de RESIF , Réseau Sismologique et Géodésique Français

 

Un réseau d’observation géophysique sur l’ensemble de la France

 Techno-Science.net , le 7.02.2012

http://www.techno-science.net

 

Lancée officiellement le 8 février, la Très Grande Infrastructure de Recherche RESIF (Réseau sismologique et géodésique français) a pour but de créer une antenne d’observation géophysique sur l’ensemble de la France métropolitaine dédiée à l’étude de la Terre interne et des risques telluriques.

Placé sous les tutelles du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, du Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et du Bureau Central Sismologique Français, RESIF mobilise une centaine de chercheurs et ingénieurs, et implique 20 établissements et organismes de recherche (1). Le Centre national de larecherche scientifique (CNRS) joue le rôle de coordinateur au sein du consortium RESIF. En développant un équipement national d’observation, RESIF devrait mettre à profit un maillage de plus de 750 instruments sismologiques et géodésiques, à travers la France et rendre disponible des données plus fines de la déformation du sol.

map resif web
Instruments sismologiques et géodésiques RESIF en métropole actuels et planifiés
© RESIF

Avec la volonté déclarée de développer une synergie accrue entre les observations spatiales et les observations dites in situ, impliquant de nombreuses disciplines (tectonique, géologie, sismologie, géotechnique, hydrologie, météorologie, géodésie, …), RESIF permettra ainsi :

– d’avancer considérablement d’une part dans la connaissance de la structure et de la composition de la Terre globale sous le territoire européen et national, d’autre part dans la compréhension de l’évolution de la planète Terre dans le temps ;

– de mieux comprendre les risques liés aux mouvements du sol, qu’ils soient d’origine naturelle (séismes, glissements de terrain, tsunamis,…) ou artificielle (barrages, mines, stockages souterrains, explosions,…) à la mesure de l’urbanisation forte et des nombreux ouvrages industriels stratégiques qui caractérisent la France. Une partie des données sera partagée avec des systèmes spécifiques d’alerte, notamment CENALT, centre d’alerte aux tsunamis ;

– d’apprécier plus finement le potentiel de stockage de produits transformés, et les ressources naturelles disponibles (géothermie, gisements, eau souterraine) dont la gestion raisonnée représente un enjeu majeur du 21ème siècle.

Des données accessibles

Par la mise à disposition immédiate des données et l’interopérabilité avec les centres européens, RESIF s’intègre dans le dispositif européen et mondial d’observations géophysiques. Il est ainsi pressenti comme une contribution française majeure à l’infrastructure de recherche européenne European Plate Observing System (http://www.epos-eu.org/). Les données de RESIF seront alors utilisées par des chercheurs du monde entier car la France métropolitaine est un exemple typique de pays fortement urbanisé et industrialisé avec une sismicité significative où les grands séismes se sont toutefois produits peu souvent.

La construction de RESIF sera réalisée grâce au soutien financier du programme d’investissements d’avenir, dont RESIF est lauréat comme Equipement d’Excellence, àhauteur de 9,3 Millions d’Euros.

Site du RESIF: http://www.resif.fr

Note :

(1) Membres de RESIF participant au Comité directeur: Centre national de la recherchescientifique (CNRS) (coordinateur), Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies renouvelables (CEA), Centre national d’études spatiales (CNES), Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer(IFREMER), Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (IFSTTAR), Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), Institut de recherche pour le développement (IRD), Institut deradioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), Institut de Physique du Globe de Paris(IPGP), Observatoire de la Côte d’Azur (OCA), Université Joseph Fourier Grenoble I, Université Paul Sabatier Toulouse III, Université de Strasbourg

Autres membres de RESIF : Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand II, Université de Bretagne Orientale, Université Claude Bernard Lyon I, Université Montpellier 2, Université de Nantes, Université de Nice Sophia Antipolis