L’AVG parle du fleuve Yprésis aux portes ouvertes d’une carrière Lafarge

 

 Sables et cailloutis de la carrière de la Gagnerie à Saint-Colomban : des dépôts d’un fleuve Yprésien de 50 millions d’années

 

Invités par Monsieur Nicolas Pucelle, Chef de la carrière-sablière de la Gagnerie et par Monsieur Jean Dugardin, responsable Foncier Environnement, deux représentants de l’AVG ont exposé l’histoire de la découverte du fleuve Yprésis lors des portes ouvertes da la carrière de la Gagnerie appartenant au groupe LAFARGE Granulats.

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              Portes ouvertes de la sablière, le vendredi 31 mai et le samedi 1er juin 2013    

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Situation de la carrière de la Gagnerie sur une vue aérienne

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  Les deux représentants de l’AVG, J. Chauvet et H. Vreken, prêts à accueillir les visiteurs

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Hendrik Vreken raconte l’histoire de la découverte du fleuve Yprésis, cartes à l’appui.

L’AVG remercie les représentants du Groupe Lafarge Granulats pour leur accueil très chaleureux et leur accompagnement  au cours de la journée.

Le fleuve Yprésis

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Tracé du paléofleuve Yprésis sur une carte satellite

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Situation de la carrière de la Gagnerie à Saint-Colomban, dans l’Yprésien fluviatile

Les dépôts fluviatiles Yprésiens de la carrière de la Gagnerie    

Les sables de la carrière de la Gagnerie correspondent très probablement à des dépôts du fleuve Yprésis. Ils contiennent des formations caractéristiques de l’Yprésien :

  • des cailloutis qui comportent des galets roulés remaniant des éléments provenant des terrains calcaires du sud-ouest du Bassin de Paris, en particulier des silex gris patinés du Jurassique et des fossiles du Crétacé supérieur (éponges silicifiées et débris de bivalves ; etc…). Des galets de quartz pourraient aussi provenir du Limousin.

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  Echantillon de cailloutis de la Gagnerie avec dragées de quartz, silex gris patinés, éponges silicifiées et débris de bibalves

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Eponges silicifiées des sables de la Gagnerie

  • des argiles grises et blanches riches en kaolinite intercalées dans les sables.
  • des argiles noires riches en matières carbonées. Des argiles analogues, rencontrées dans plusieurs sites dont celui de l’Anse Rouge de Noirmoutier, ont livré d’abondants pollens. L’étude de ces pollens a permis de reconstituer la végétation de l’époque, celle d’une forêt tropicale humide avec des zones marécageuses à mangrove. Les espèces végétales identifiées sont typiques de la végétation de l’époque Yprésienne ; ce sont elles qui ont permis de déterminer l’âge du fleuve. 

 

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Argile noire charbonneuse et argile blanche riche en kaolinite de la Gagnerie

 

Situation de l’Yprésien dans une échelle des temps géologiques 

Echelle stratigraphique - Copie copie copie 

 Première publication sur Yprésis en 1994

En 1994, Gaston Godard, Michel Chevalier, Pascal Bouton, Bernard Mouroux, publiaient dans le bulletin n°4 de la Société Géologique de France un article de 20 pages sur la découverte d’  » Un fleuve Yprésien du Berry à La Vendée, témoin de l’évolution paléogéographique et tectonique du Centre- ouest de La France au Cénozoïque. »

Ce fleuve dénommé Yprésis traversait notre région, il y a environ 50 millions d’années, à l’époque Yprésienne (Éocène inférieur, début du Tertiaire). A cette époque, les Dinosaures avaient disparu depuis 15 millions d’années avec la grande crise biologique Crétacé-Tertiaire (crise K-T), tandis que l’Homme n’apparaîtra que 45 millions d’années plus tard.

Des traces de ce fleuve semblent exister jusqu’en Brenne, aux confins du Berry et de la Touraine. Mais c’est surtout à l’ouest de Poitiers, dans les régions de Parthenay puis de Bressuire, que les sédiments fluviatiles dessinent une traînée claire, large de 5 km en moyenne et dirigée vers le Nord-Ouest. Dans les collines vendéennes, l’érosion ultérieure a fait disparaître ces sédiments, mais le fleuve a néanmoins laissé un vestige : il s’agit de la vallée fossile de Saint-Mars-la-Réorthe qui dessine un couloir de 2 km de large, 8 km de long et 50 m de profondeur entre Les Epesses et Les Herbiers. A l’Ouest de Mesnard-la-Barotière, les sédiments réapparaissent et forment une traînée large de 4 km environ, jusqu’à Montaigu. Ils s’élargissent ensuite en aval de Montaigu et recouvrent de très larges surfaces dans tout le Nord-Ouest de la Vendée et le Sud-Ouest de la Loire-Atlantique. Cette région comprise dans l’angle Nantes – Montaigu –  Challans constituait alors le delta du fleuve disparu.

Histoire de la découverte du fleuve Yprésis

Le temps des pionniers.

Les sables, les cailloutis et les grès du Sud-Ouest de la Loire-Atlantique et du Nord-Ouest de la Vendée, en particulier ceux de Noirmoutier, furent étudiés au début du XIXème siècle par Bertrand Geslin, Auguste Rivière, Adolphe Archiac. Ils les attribuèrent au Crétacé supérieur (90 millions d’années), car ils y avaient observé des fossiles de cette époque (éponges,brachiopodes). Ces fossiles roulés provenaient du Bassin Parisien et furent usés et transportés après le Crétacé.

   Une fausse piste : le golfe pliocène de Montaigu

En 1881, Louis Crié montra que les grès de Noirmoutier appartenaient à l’Eocène grâce à la découverte d’empreintes de plantes fossiles de cette époque, les palmiers du genre Sabal. Dans le même temps, Gaston Vasseur étudia les sédiments tertiaires de l’Ouest de la France. Il montra que les sables de la vallée de la Vilaine s’étaient déposés dans une mer au Pliocène (2 millions d’années). On pensa extrapoler cette conclusion aux dépôts de la Loire-Atlantique et de la Vendée. Ces sédiments se seraient déposés dans un golfe de la mer pliocène nommé « paléo­golfe de Montaigu ». Cette conception entraînait une anomalie difficile à expliquer à Noirmoutier, les sables d’âge  » pliocène », donc récents, étant surmontés par les grès éocènes, nettement plus anciens.

  Nouvelles découvertes grâce à la micropaléontologie

Vers 1959, Suzanne Durand employa une nouvelle technique de datation : la palynologie. Elle montra que les pollens contenus dans les sédiments de Noirmoutier appartenaient à des espèces végétales vivant à l’Eocène. Des pollens du même âge furent trouvés dans les sables de Savenay et de Bourgneuf-en-Retz, ils n’étaient pas liés à la mer du Pliocène. Durant les 3 décennies qui suivirent, des études réalisées par Mireille Ters vinrent confirmer la présence dans toute cette région de sédiments de l’Eocène inférieur appelé Yprésien. Dans le même temps, les techniques de datation absolue utilisant les concentrations d’isotopes radiogéniques des roches permettaient d’estimer àenviron 50 millions d’années l’âge de cet étage Yprésien. D’autre part, l’étude des grains de sable, leur usure, leur taille, concluaient que ces sédiments avaient des caractères de dépôts fluviatiles.

 La découverte de l’ancien fleuve Yprésis

En 1990, à l’occasion des levés de la carte géologique (feuille de Montaigu), Gaston Godard et Michel Chevalier découvrirent que les sédiments du prétendu paléo-golfe pliocène de Montaigu se prolongeaient vers le Sud-Est jusqu’aux environs de Mesnard-la Barotière. L’allure en carte des dépôts suggérait une ancienne vallée fluviatile s’élargissant en delta plutôt qu’un golfe marin. L’âge Pliocène devait donc être abandonné au profit d’un âge Yprésien.

Depuis longtemps, on avait observé que les sédiments comportaient de nombreux galets de silex jurassiques : les chailles et quelques fossiles roulés du Crétacé. Ces éléments, transportés par le fleuve, ne pouvaient avoir été empruntés qu’aux sédiments du Bassin Parisien et du Seuil du Poitou. Des traces de l’ancien fleuve devaient donc exister plus loin en amont, vers l’Est. Une large traînée à sables et cailloutis avec les mêmes galets de silex, les mêmes fossiles remaniés fut en effet retrouvée dans la région de Bressuire et suivie jusqu’aux environs de Poitiers. Certains géologues avaient déjà reconnu la présence d’une « formation fluviatile divaguante d’âge éocène ». Des traces du cours disparu semblaient exister plus loin encore vers l’amont jusque dans le Berry. L’absence de sédiments conservés dans les collines vendéennes était rapportée à l’effet de l’érosion plus active dans cette région accidentée et à la surrection du haut bocage vendéen ; la « trouée de Saint-Mars-la-Réorthe » dont l’existence n’avait jamais reçu d’explication vraiment satisfaisante, pouvait représenter un vestige de l’ancienne vallée creusée par le fleuve.

Article de Jean Chauvet

       

En complément, le compte-rendu d’une excursion de l’AVG en 2011 :

 » Sur les traces du paléofleuve Yprésis « 

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